Communiqué à propos des évènements de Ceuta et Melilla

actualité du 12/10/2005

Le communiqué de presse au format pdf

Ces derniers jours, les images de milliers de personnes désespérées essayant de franchir la clôture qui sépare l'Europe de l'Afrique, à Ceuta et à Melilla, certaines tuées par balles ou lacérées et l'abandon criminel de beaucoup d'entre elles en plein désert, avec la mort pour seul destin, dénoncé par les ONG, ont ébranlé la conscience de nombreux européens.

Nous dénonçons l'hypocrisie des autorités espagnoles et européennes qui militarisent la frontière tout en négociant pour quelques millions d'euros la possibilité d'éloigner le problème de quelques kilomètres plus au sud, prétendant ainsi laisser le sale boulot aux autorités marocaines. C'est être aveugle, c'est indigne et en plus cela ne fonctionnera pas. Nous condamnons la brutalité criminelle des autorités espagnoles et marocaines et nous réclamons l'intervention immédiate des tribunaux internationaux.

Ces événements dramatiques sont la partie émergée de l'iceberg ; ils rendent manifeste l'impasse où mènent les lois restrictives, les solutions policières ou armées face à l'immigration. Ils mettent aussi en évidence l'échec retentissant de la soi-disant "politique de coopération" qui n'a pas résolu le problème de fond.

Cette politique de coopération a échoué parce que "l'aide" a été donnée sous condition (je te donne tant et tu m'achètes tant et tant), parce qu'elle répond à des intérêts partiaux, sans coordination et parce qu'elle est foncièrement insuffisante. L'effacement de la dette dont on nous parle maintenant n'est qu'un mirage (nous annulons quelques millions, que nous sommes certains qu'ils ne peuvent pas payer et ensuite nous annonçons partout que nous les avons aidés de quelques millions de plus pour qu'ils " se développent…") Cette "coopération" est entachée par le mensonge comptable, la corruption et surtout par une intention qui ne vise pas à changer les choses parce qu'elle ne comprend pas que le destin de tous se joue de concert.

Tant que les causes profondes seront éludées, toute solution ne sera qu'un palliatif et ne pourra qu'amplifier cette situation aussi absurde que cruelle. La pauvreté dans ces régions du monde a des responsables : ceux qui en ont détruit les cultures et exploité les richesses naturelles, ceux qui ont fermé le futur. Ceux-là mêmes qui produisent en Europe la précarité de l'emploi, le consumérisme, l'individualisme et la peur. Ce sont les pouvoirs financiers qui, hors de tout contrôle, se concentrent, exercent leur domination réelle sur les pouvoirs politiques formels et déshumanisent la vie.

Par nécessité autant que par cohérence, la coopération devrait être offerte comme " remède " et non comme un palliatif insuffisant et conjoncturel. Par nécessité et par cohérence, les transactions financières devraient être taxées pour que la course aveugle et sans but des grandes machines économiques commence à s'inverser et pour qu'elles servent à récupérer les gens et la terre. En d'autres temps, il y a 60 ans, une Europe détruite a reçu une aide économique réelle qui lui a permis de se relever et de se "soigner". Il avait alors suffis de 13 000 millions de dollars, en aides alimentaires et matérielles. Le monde a beaucoup changé depuis et l'ampleur et la complexité des nécessités se sont accrues, mais la cohérence a toujours les mêmes règles.

L'Europe a besoin de l'immigration. Les immigrants ont besoin d'un futur. Indépendamment de notre besoin des immigrants comme force de travail, il est nécessaire de défendre et d'appliquer les droits de l'homme pour les assister.

Deux chemins s'ouvrent à nous :
D'un coté, en une fuite insensée, l'Europe peut tenter de se "protéger", de poser des barrières sur les océans, d'étendre des barbelés sur toutes ses frontières (puis continuer de poser des barbelés à l'intérieur, essayant inutilement de se protéger… d'elle-même !).
De l'autre, elle peut se lancer dans un projet historique qui lui permettra de se lever et d'aider à lever des continents, de créer des conditions de vie pour elle et pour d'autres, d'ouvrir la voie à un autre monde. L'Europe peut et doit changer les règles du jeu, en impliquant tous les pays africains dans un plan commun de développement. Un plan cohérent devra compter sur l'accord et l'initiative africaine et aura de grandes conséquences économiques, sociales, politiques et culturelles pour l'Afrique… et pour l'Europe.

En attendant, les humanistes exigent :

1. De rendre effectives les conventions internationales en appliquant les résolutions de l'ONU protégeant le droit d'asile.
2. Que la lumière soit faite sur la mort des immigrants aux frontières de Ceuta et Melilla et que les responsables directs et indirects soient jugés.
3. Que des enquêtes soient menées sur l'attitude du gouvernement marocain et sur la connivence espagnole face aux événements récents ainsi que sur l'expulsion des immigrants aux frontières de l'Algérie et de la Mauritanie, abandonnés à leur sort en plein désert.
4. La régularisation immédiate et réelle de tous les immigrants à l'échelle de l'Europe.
5. La fermeture immédiate des Centres d'Internement sur le sol européen.

Secrétariat Cultures, Migrations et Coopération Internationale de la Régionale Humaniste Européenne
Parti humaniste